Le 16 avril 2025
Lettre ouverte de SUD Santé Sociaux des Vosges à la Commission d’Enquête sur la Crise de l’Hôpital Public
Mesdames les députées, Messieurs les députés,
Vous nous réunissez aujourd’hui pour « identifier les origines de la crise de l’hôpital public ». Mais la vérité, c’est qu’on ne découvre pas un naufrage quand le navire est déjà à moitié coulé. La catastrophe sur laquelle vous enquêtez aujourd’hui, nous, soignant-e-s, agent-e-s hospitaliers, nous la vivons tous les jours, depuis des années, dans notre chair, dans notre santé, dans notre dignité et dans nos convictions de soignants. Et surtout, les usager-e-s la subissent, au prix parfois de leur vie.
Ne faisons pas semblant : la crise de l’hôpital public est le produit d’un démantèlement méthodique, organisé et idéologique de notre système de santé. Ce n’est pas un « dysfonctionnement », c’est une stratégie. Depuis des décennies, au nom de la sacro-sainte « maîtrise des dépenses », on a asphyxié l’hôpital. Tarification à l’activité, suppressions de lits, fermetures de services, management autoritaire, budgets contraints, recrutements gelés… et on voudrait maintenant nous demander pourquoi ça ne fonctionne plus ?
C’est une politique de destruction, pas une fatalité.
On nous impose des économies par milliards, mais nous, on compte les collègues en burn-out, les postes non pourvus, les patients sur des brancards, les morts évitables. Pendant ce temps, on gave les cliniques privées, on externalise à tour de bras, on laisse les GHT avaler les établissements comme des machines à broyer le service public.
Et qu’on ne vienne pas nous parler du “manque d’attractivité”. L’attractivité, c’est un mot de DRH. Ce qu’il faut, ce sont des salaires décents, des effectifs suffisants, du temps pour bien faire notre travail, de la reconnaissance réelle, pas des médailles en chocolat.
La gouvernance hospitalière ? Une machine verticale et autoritaire, où les soignants sont réduits au silence et où les logiques comptables piétinent l’intérêt général. Ce qu’il faut, c’est une démocratie sanitaire réelle, avec les équipes au cœur des décisions.
Ce que nous réclamons, ce que nous revendiquons, ce que nous exigeons, c’est un véritable plan de réinvestissement massif dans l’hôpital public, une rupture avec les logiques néolibérales, un refus ferme de la privatisation rampante, et surtout, s’il vous plaît, la réintégration de l’Humain quel qu’il soit au cœur du soin.
Nous n’attendons pas de cette commission des larmes de crocodile. Nous voulons des actes. Le constat est déjà fait depuis longtemps, dans les rapports, dans les luttes, dans les cris d’alerte lancés sans relâche par les soignants et les syndicats. Ce qu’il manque aujourd’hui, c’est le courage politique de changer de cap. Radicalement. Immédiatement.
Parce qu’on ne soigne pas avec des ratios, des tableurs Excel ou des plans « Santé 2030 ».
On soigne avec du temps, de l’écoute, de la présence, de la compétence… et du respect.
Et aujourd’hui, c’est tout ça qu’on nous a volé…